J'ai attentivement écouté Nicolas Sarkozy lors de son dernier discours, prononcé le vendredi 4 avril dernier à Bercy, portant sur la Modernisation des Politiques Publiques et Réforme de l'Etat.
De la même façon, j'ai pris la peine de relire soigneusement ce texte ("Seul le prononcé fait foi", voir en fin d'article) téléchargé sur le site présidentiel (www.elysee.fr) qui, finalement, m'apparaît plus superficiel que fondateur. Pour justifier mon propre point de vue, dont on peut se douter qu'il n'est guère optimiste, j'appelle en renfort trois économistes de terrain dont le jugement, au point où nous en sommes arrivés, n'est pas moins pessimiste que le mien.
Alexander LAW, chef économiste au cabinet de recherche Xerfi, considère pour sa part que "Sept milliards, ce n'est pas une goutte d'eau mais ça ne montre pas l'ampleur des efforts qui sont nécessaires (...)".
Pour Philippe WAECHTER, directeur de la recherche chez Natixis asset management, "Sept milliards ne nous permettront pas de retrouver l'équilibre en 2012, et 150 mesures pour sept milliards, ça veut dire qu'on récupère quelques euros par-ci par-là mais ça ne traduit à aucun moment une orientation claire de ce que doit être la politique budgétaire".
Enfin Marc TOUATI, mon préféré, directeur de la recherche économique chez Global Equities, déplore des mesurettes : "Sept milliards d'euros d'économie alors que le gaspillage des deniers publics dépasse les 70 milliards d'euros au cours des six dernière années, c'est bien mince".
Ces trois spécialistes ne se contentent d'ailleurs pas de critiquer les annonces présidentielles : ils indiquent aussi, chacun selon son coeur, des pistes que le pouvoir politique pusillanime ne semble pas même vouloir envisager tant il a peur de son ombre !
Selon Marc TOUATI : "Il n'y a qu'une seule chose à faire : réduire massivement la dépense publique, c'est-à-dire de 54% du PIB actuellement à 50%". "Cela représente un effort d'environ 70 milliards d'euros, avec les 7 milliards annoncés, nous sommes très loin du compte".
Philippe WAECHTER estime, quant à lui, que "la vraie problématique est la dérive continue des comptes sociaux", suivez mon regard vers nos petits bricoleurs si friands d'usines à gaz : le gaz, ça peut être très dangereux...
Pour sa part, Alexander LAW pense qu'"il faut aller plus loin dans la réforme du marché du travail et relancer l'économie en accroissant la concurrence et en réduisant les distorsions sur l'ensemble des marchés, c'est un chantier qui n'en est qu'à ses balbutiements".
Enfin, l'excellent journaliste Ivan Rioufol écrit : "Même les mots font peur. Le gouvernement n'ose dire "rigueur", mais François Fillon annonce "des économies partout" et des efforts pour tous. Cette réserve ne rime à rien, quand le budget de l'Etat connaît un déficit tel que le financement du revenu de solidarité active semble également compromis. La crainte de dire les choses dissimulerait- elle une impréparation ?".
Justement, les mots font si peur que le texte officiel du discours, je cite : "Car (...) ce ne sont pas les économies qui feront la réforme, c'est la réforme qui permettra les économies. Seule la réforme permettra d'accroître la qualité du service public tout en faisant des économies" est devenu, dans le feu de l'action, sachant que "seul le prononcé fait foi" : "Ce n'est pas les économies qui font la réforme mais la réforme qui permettra des économies. C'est la différence entre rigueur et réforme" (AFP).
Qu'en termes improvisés et prudentissimes ces choses-là sont dites selon la direction et la force du vent (socialiste) ! Mais de quelque façon que l'on s'y prenne pour le dire, le chef de l'Etat ne fait que rééditer politiquement le fameux paradoxe de l'oeuf et de la poule : Qu'est-ce qui est apparu en premier : l'oeuf ou la poule ? Baste ! Vous avez dit : rupture ?