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  • G20 , un franc succès

    Source : http://gsorman.typepad.com/guy_sorman/2010/06/g20-un-franc-succ%C3%A8s.html

     

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    Le G20 n’a pris à Toronto aucune décision : quelle chance ! C’est le meilleur résultat que l’on pouvait espérer pour l’économie mondiale. Lorsque des chefs d’Etat se réunissent, il faut craindre qu’ils jugent utile d’agir à tout prix pour démontrer leur utilité. Alors que la vertu en économie est souvent de ne pas agir et de laisser les mécanismes spontanés du marché panser ses plaies, guérir de ses propres erreurs et plus encore compenser les interventions maladroites des charlatans de l’économie et de la politique, le G20 a donc sagement écarté deux propositions majeures qui l’une et l’autre n’auraient eu que des effets néfastes. La première de ces propositions émanant des dirigeants allemands et français devait taxer les transactions bancaires. Dans l’esprit de leur promoteur, on ne sait s’il s’agissait d’une sorte de définition rétroactive sur de mauvais comportements – une sorte de zéro de conduite à perpétuité – de démagogie pure ou d’un simple expédient pour renflouer les déficits publics. La seule conséquence d’un tel impôt aurait été de fausser la concurrence entre banques taxées et banques non taxées et pire encore, de renchérir et raréfier le crédit au secteur privé. Or ce qui manque le plus à la reprise économique est actuellement la rareté et la cherté du crédit. Par bonheur, ce projet à contretemps et contresens, a été rejeté par les pays anglo-saxons qui comprennent mieux la fonction de la finance dans le capitalisme, que ne le font les Français et les Allemands : Français et Allemands très professeurs de morale quand il s’agit d’argent.

    L’autre proposition contreproductive venait du Président américain qui s’est révélé au G20, prisonnier de l’idéologie keynésienne et de son entourage de conseillers sectaires. Barack Obama     observant que la crise n’était pas terminée – ce qui est incontestable - souhaitait que chacun s’engage dans une nouvelle étape de « stimulation » de la croissance par la dépense publique. La proposition était d’autant plus étrange que les Etats-Unis depuis 2008 ont déjà lancé deux plans de relance sans autre résultat que des dettes : les quelques études scientifiques menées aux Etats-Unis, en particulier par Edward Glaeser à Harvard et John Taylor à Stanford, ont montré que ces stimulations budgétaires ont créé zéro emploi. Ce que l’on appelle en jargon économique le « multiplicateur keynésien » (l’Etat investit 1 $ et ce dollar rapporte 1,5 $) n’existe pas et n’a sans doute jamais existé. Le Japon qui en quinze ans de relance publique n’a jamais généré ni emploi, ni croissance a réfuté le keynésianisme d’Obama et – surprise – les Européens aussi. L’Europe est soudain devenue libérale : non seulement les plans de relance de 2008 à 2010 n’ont suscité aucune reprise, ils ont plutôt aggravé la crise. Les besoins de financement des Etats ont privé les consommateurs de leur pouvoir d’achat et les entrepreneurs de leur capacité d’innover. Mais il ne s’agit pas tant d’une conversion intellectuelle au libéralisme que d’un constat : les Européens, contrairement aux Etats-Unis (le désir du monde entier pour les bons du Trésor américains paraît inextinguible par tous les temps) n’ont plus les moyens de s’endetter, l’Euro ou la Livre sterling trouvent de moins en moins de repreneurs. Certains en Europe semblent aussi avoir compris ce qu’expliquait naguère l’économiste et homme d’Etat  Raymond Barre : l’économie a besoin de stabilité à long terme plutôt que de pulsions imaginatives de court terme. Ce qui vient d’être confirmé par l’économiste italien professeur à Harvard, Alberto Alesina : lui vient de publier une étude persuasive et largement diffusée en Europe, qui démontre que dans le long terme, la réduction des dépenses de l’Etat et l’équilibre budgétaire sont les meilleurs moteurs de la croissance : l’évidence même, mais qu’Alesina fonde sur des séries historiquement constatées.

    S’il reste donc au terme de ce G20 quelques keynésiens, ils s’avèrent bien isolés : alors qu’en 2008, on nous annonçait la mort du libéralisme, néo et ancien et le grand retour de Keynes et de l’intervention cyclique des Etats, il aura suffi de deux ans à peine pour que Keynes réintègre son placard. Keynes en réalité, ce n’est pas de l’économie, mais une passion idéologique pour l’Etat contre le marché : passion coûteuse et abordable uniquement pour ceux qui ont les moyens d’entretenir cette maîtresse.

    Et par-delà les mauvaises décisions non prises, ce G20 aura été remarquable par les leçons de bon sens dispensées par les pays dits émergeants tels l’Inde, le Brésil, la Chine, la Corée du Sud. Eux se souviennent de leur pauvreté de masse toute récente : ils savent comment ils y ont échappé. Ils n’étaient pauvres que pour avoir réfuté le capitalisme, fermé leurs frontières, exterminé leurs entrepreneurs. Dès l’instant où ils se sont convertis au libéralisme économique, toutes cultures et régimes politiques confondus, ces pays ont commencé à rattraper leur retard à grande vitesse. Il est tout de même paradoxal que les Présidents de Corée du Sud ou du Brésil, l’un de droite, l’autre de gauche, doivent rappeler aux Américains que la prospérité des peuples passe par le capitalisme et le libre-échange. Mais le plus remarquable sans doute, dans ces réunions au sommet – quoi que l’on pense de leur caractère ostentatoire et dispendieux – est le non-dit : nul ne prononce l’éloge de systèmes disparus – étatisme, communisme, socialisme, autarcie – et nul, fut-ce en période de crise, n’envisage d’utopie alternative au capitalisme mondialisé. Dieu sait si le capitalisme mondialisé grouille de défauts pratiques et éthiques. Dieu sait si la croissance seule ne sait pas le bonheur de l’humanité. Mais tacitement, il est admis, pas même débattu, que l’humanité a trop souffert au 20e siècle pour avoir expérimenté tant d’alternatives à ce capitalisme mondialisé : toutes ces expériences ont échoué. Il faut donc envisager que le système économique présent, parcours accidenté de pics en crise mais en ascension sur le long terme, corresponde à la nature humaine. Il est remarquable aussi dans ces sommets ostentatoires que la quasi totalité des chefs d’Etat présents ont été élus démocratiquement. L’ultime tyran, le Président chinois doit se sentir quelque peu isolé et la Présidente argentine est l’ultime témoin d’un caudillisme latino-américain en voie de disparition. Le G20 au total est une représentation d’un monde qui ne va pas si mal et dont on pourrait conclure qu’il progresse en termes matériels aussi bien que moraux.

    Guy Sorman

  • Madelin s'interroge sur un changement de cap en 2012

    Source : http://www.reseauliberte.eu/


    Alain Madelin, mercredi, dans son bureau parisien.

    Alain Madelin, mercredi, dans son bureau parisien.

    L'ex-chef de file des libéraux était vendredi au rassemblement des Réformateurs d'Hervé Novelli.

    LE FIGARO. - Vous renouez avec la politique ?

    Alain MADELIN. - Pas vraiment. J'ai rendu une visite d'amitié à ceux qui représentent le courant libéral à l'UMP. Mais si je suis aujourd'hui en retrait de la vie politique, cela ne signifie pas pour autant que j'ai pris ma retraite.

     

    Le libéralisme a été désigné comme le grand responsable de la crise. Peut-il s'en remettre ?

    Je pense que la sortie de crise est une sortie du purgatoire pour les libéraux. Elle fait de leurs propositions une ardente obligation. On nous annonçait il y a peu le retour de l'État, pour discipliner les méchants marchés irresponsables, et on a aujourd'hui le retour des marchés financiers pour discipliner les États irresponsables. La grande nouveauté de la prochaine présidentielle, ce sera d'ail­leurs que les programmes des candidats seront observés de très près par les marchés financiers. Si l'on était en 2012, ils accorderaient sans doute un triple A à Nicolas Sarkozy et un BB - à Martine Aubry.


    Même si la France ne fait pas les mêmes efforts de rigueur que ses voisins ?

    Après l'absurde concours du plus grand plan de rigueur keynésien, lancé par M. Strauss-Kahn, voici qu'on lance celui du plus grand plan d'austérité. Nous avions une dette avant la crise que l'on considérait déjà comme in-sou-te-nable ! Aujourd'hui, l'assainissement, que je préfère au mot rigueur, est incontournable pour tout gouvernement, quel qu'il soit. Il faut rembourser notre dette pour éviter la «madoffisation» de notre économie, c'est-à-dire une situation où l'on est obligé de faire de nouveaux emprunts uniquement pour rembourser les intérêts des emprunts précédents.


    Le gouvernement vise le retour à un déficit de 3 % du PIB en 2014. L'objectif est-il tenable ?

    Le calendrier est bon, mais il est lié à des prévisions de croissance qui nécessitent une politique de libération de la croissance, parallèlement à la politique de réduction de la dépense publique. Et ce sont là, qu'on le veuille ou non, les deux piliers d'une politique libérale.


    La révision générale des politiques publiques ne suffira pas à réduire les dépenses ?

    Non. Il faut revisiter le périmètre de l'État, en accroissant la part des activités d'intérêt général soumises à la concurrence et aux choix individuels par rapport à la part de la dépense publique soumise aux décisions politiques et aux choix collectifs.


    Comment relancer la croissance ?

    Nous avons besoin en fait d'une hyper-croissance car nous devons rembourser une hyper-dette. S'il n'est pas dans le pouvoir de l'État de fabriquer la croissance, il peut en revanche la libérer. Et l'État a deux leviers pour cela : la fiscalité et la concurrence. Augmenter nos impôts, et tout particulièrement la progressivité de nos prélèvements fiscaux et sociaux comme beaucoup le proposent - y compris, hélas, dans la majorité - serait le meilleur moyen d'étouffer la croissance. Si vous voulez taxer les riches pour des raisons de cohésion sociale, au moins, taxez les riches inutiles, la richesse qui dort plutôt que la richesse qui crée.


    Et comment injecter de la concurrence ?

    En faisant par exemple fonctionner le marché du travail comme un vrai marché - regardez de ce point de vue le succès de l'autoentrepreneur ! La concurrence, c'est l'ouverture de secteurs étatiques protégés ou hyper-réglementés. C'est une source de productivité, de richesse et donc d'emplois.


    Vous voyez Nicolas Sarkozy adopter ce projet ?

    La question qui va se poser à ceux qui réfléchissent à l'échéance de 2012, c'est un changement de cap. Le «tout est possible» de Nicolas Sarkozy a souvent été interprété comme : «Avec un super-président et un super-État, on peut tout espérer.» On a oublié le «ensemble». Il va falloir revenir à la formule «l'État ne peut pas tout faire» et donner un peu de consistance au «ensemble». C'est-à-dire traiter les Français comme étant potentiellement des acteurs responsables. Tout l'inverse de la société du «care» proposée par les socialistes, qui veulent étendre la sollicitude de l'État bien au-delà de la frontière de ceux qui ne peuvent pas s'aider eux-mêmes.

  • Une légende bien entretenue

    Source : http://libertylovers.blogspot.com/

    Le barouf médiatique autour de l'appel du 18 juin amène à se reposer quelques questions sur l'importance historique d'un homme qui semble aujourd'hui être l'objet d'une idolâtrie béate.
    Sur l'appel lui-même, le moins que l'on puisse dire est qu'il fut très habilement exploité au plan médiatique, alors qu'il ne mérite tout bien considéré, qu'une place assez dérisoire dans le contexte de l'époque.
    De Gaulle propulsé comme instigateur de la résistance et héraut de la France libre, celle « qui ne se rend pas », par la seule vertu d'une déclaration qu'il l'enregistra tranquillement carapaté à Londres, au moment le plus tragique de la défaite, cela pourrait prêter à sourire, si les conséquences n'avaient pas été si terribles et durables.
    De là naquit en effet une légende tenace qui transforma de manière manichéenne les uns en sauveurs de la patrie, les autres en traîtres, en divisant profondément la France, et en infectant la plaie causée par la reddition puis par l'occupation.

    Sans chercher à rouvrir un débat qui n'en finit pas de meurtrir le pays, il devrait être possible de dire que De Gaulle, qui avait paraît-il « une certaine idée de la France », ne chercha guère à en panser les blessures. L'affreuse épuration qui suivit la fin de la guerre et qui fut peu ou prou avalisée par lui et son entourage, reste comme une tache indélébile sur son uniforme. Parmi les innombrables victimes qui payèrent au prix fort des crimes souvent imaginaires ou largement exagérés, il faut citer Louis Renault, dont le sort atroce est rarement évoqué, alors qu'il constitue un des épisodes les plus honteux de cet époque. Non seulement De Gaulle pilota les tribunaux d'exception qui déchainèrent une foudre haineuse et inique sur un homme innocent et malade, mais il nationalisa sans vergogne ses usines 4 mois après sa mort !
    En réalité, à aucun moment depuis la Libération et jusqu'à sa disparition, il n'essaya vraiment de mettre en oeuvre une vraie politique de réconciliation. Aujourd'hui encore le fossé reste béant et les divisions profondes.

    D'une manière générale, qu'en est-il de l'héritage soi disant prestigieux du Général ?
    Certes il réussit à remettre en ordre une France détruite, corrompue et déchirée par l'occupation, mais ce fut au prix du retour en force des Communistes qui instillèrent leur influence désastreuse sur le pays et en politisèrent durablement toutes les infrastructures.
    Certes il fut l'artisan avec le chancelier Adenauer d'un début de réconciliation avec l'Allemagne, mais à aucun moment la France ne parvint à imprimer une dynamique à la construction de l'Europe. La vision du chef de l'Etat français en la matière était d'ailleurs à la fois bornée et inconséquente. Il en voyait les contours « de l'Atlantique à l'Oural », alors que toute la partie Est du continent était plongée dans les ténèbres soviétiques. De l'autre côté, il s'ingénia à empêcher l'entrée de l'Angleterre dans le club, tout en ruinant l'espoir de voir surgir une grande et forte union militaire avec les Etats-Unis, lorsqu'il claqua la porte de l'OTAN.
    In fine, son attachement chauvin à la nation lui faisait de toute évidence mépriser l'idée même de l'Europe surtout dans sa conception fédérale (on se rappelle l'anecdote des cabris).

    La grandeur de la France Gaullienne est un vain mot. Il abandonna une bonne partie de l'empire colonial, non sans raison, mais d'une manière indigne. Il devrait de ce point de vue apparaître comme un destructeur aux yeux des nostalgiques de la France impériale (qui  manifestent pourtant une curieuse fascination pour sa stature balourde). Il y a peu de chances en tout cas qu'il passe un jour pour un bienfaiteur aux yeux des peuples brutalement livrés à l'indépendance, c'est à dire souvent abandonnés à des régimes sanguinaires et rétrogrades.
    De ce point de vue, la politique africaine de la France ne fut pas très admirable, charriant dans son sillage quantité de lâchetés, de magouilles, de compromissions et de protections douteuses.
    En matière de politique intérieure, il restaura plus que jamais la centralisation et la bureaucratie. Peu d'imagination caractérisa sa politique crispée sur les prérogatives de l'administration et la tutelle omniprésente de l'Etat. Même les grandes réalisations furent souvent des échecs ruineux ou bien des symboles grandiloquents mais peu efficaces : du paquebot France au Concorde, en passant par la bombe atomique...
    La même tendance sévit au plan culturel, dont le rayonnement ne fut pas un des points forts de ce régime en dépit des fameuses maisons créées par Malraux à cet effet. Qu'on se souvienne  que la France durant de nombreuses années, dut se contenter d'une télévision entièrement étatisée via l'ORTF, pendant que l'information elle-même, avait son ministère !

    En définitive, il me paraît opportun de terminer cette analyse un tantinet anticonformiste par la formule assassine mais assez jolie de Pierre Assouline sur son blog : « le génie politique de De Gaulle a été d’offrir aux Français des mensonges qui les élèvent plutôt que des vérités qui les abaissent. » Ne souffrons-nous pas toujours de cette délicieuse perversion ?

    Sur le sujet, il serait également judicieux de ressortir l'essai décapant et insolent mais parfaitement ajusté de Jean-François Revel : Le Style Du Général.
    On pourrait aussi relire le très oublié Coup d'Etat Permanent d'un certain François Mitterrand (qui hélas ne s'inspira guère de ses bonnes idées lorsqu'il accéda lui-même à la fonction...)