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étalon-or

  • Il faut rétablir l’étalon-or de l’euro


    ll y a quelque chose de tellement pourri au "royaume" de l’euro que l’on se demande par quelle aberration l’Europe s’est engagée dans la voie à sens unique de la monnaie unique. Peut-être y a-t-il une ruse de l’histoire dans ce cheminement calamiteux. Mais alors, quelle pourrait être la raison cachée de l’euro ?

    Dans un espace géographique donné, une monnaie unique suppose une libre circulation des biens, des capitaux et de la main-d’oeuvre et une flexibilité complète des prix et des salaires. Si le travail n’obéit pas à cette loi d’airain, alors que marchandises et capitaux lui sont soumis, des poches de chômage apparaissent dans certaines régions, dans certains pays, qui ne pourraient être réduites que par des efforts budgétaires hors de portée de l’Union européenne dans l’état actuel de ses institutions.

    Toujours là, ces forces de dissolution sont, non pas contenues, mais masquées par l’euro en ce qu’il a supprimé les thermomètres qui permettaient de mesurer les divergences entre les Etats membres. Il en résulte que beaucoup de pays membres empruntent à des taux plus bas et se permettent des déficits plus élevés qu’ils ne le pourraient s’ils avaient encore leur propre monnaie. Ces subterfuges ne peuvent évidemment pas durer.

    Autre aberration du point de vue des princes qui nous gouvernent : les Etats ont abandonné ce qui était considéré, génération après génération, comme un attribut régalien, à savoir le pouvoir de frapper monnaie, pour le confier à une banque centrale, sise à Francfort, qui, par un coup de force institutionnel, a été proclamée indépendante. Il avait été prévu, au départ, du plan Werner (1970) au plan Delors (1989), que ce pouvoir monétaire exorbitant serait contrebalancé par une instance économique intergouvernementale. Le deuxième pilier de l’édifice a été oublié en route. L’édifice actuel est non seulement bancal, mais en plus il n’a aucune légitimité démocratique.

    Enfin, faut-il le rappeler, il n’y a rien dans le pacte fondateur de l’Union européenne, le traité de Rome du 25 mars 1957, qui laisse entrevoir que cette Union nécessiterait une unification monétaire - et de fait, elle n’en nécessitait aucune du seul point de vue économique et financier.

    Si, toutefois, l’on ne renonce pas à trouver un sens à ce cheminement extravagant, on observera d’abord cet "avantage acquis" de l’euro : la monnaie, en Europe, a été éloignée du pouvoir politique, et si des peuples recrus d’histoire ont si facilement abandonné des signes monétaires auxquels ils étaient accoutumés depuis des siècles, c’est justement que, las des manipulations étatiques de la planche à billets, ils ont accueilli avec soulagement cette autonomisation de la monnaie, laquelle pourrait servir de plate-forme au rétablissement de l’étalon-or par l’Europe.

    Le pacte de stabilité et de croissance de 1997 - certes fragile, on le voit bien aujourd’hui -, pouvait même être considéré comme un premier pas dans cette direction. Mais à quoi bon subir les disciplines de l’étalon-or sans jouir de ses avantages ?

    Grâce à l’existence même de l’euro, Nicolas Sarkozy peut réussir là où le général de Gaulle, qui ne disposait que du franc, a échoué : mettre fin au vice du système monétaire international en rétablissant la convertibilité métallique. Le président français a, du reste, laissé la porte ouverte pour une telle solution en appelant de ses voeux lors de son allocution du 5 février l’instauration d’"un régulateur international".

    Dans cette démarche, l’Europe peut trouver des alliés : la Russie, l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), le Brésil, l’Inde, mais aussi, bien sûr, la Chine, encombrée de ses milliards de dollars, qui vient de donner un signal intéressant en révélant après coup qu’elle avait quasiment doublé ses réserves en or.

    Si l’Europe ne choisit pas cette voie, elle risque de subir une fois de plus, tel un satellite, les ravages de l’inflation américaine. C’est bien cette dernière qui est responsable de la fantastique flambée des cours du pétrole et des autres matières premières en 2008.

    La nouvelle vague d’inflation, voire d’hyperinflation américaine qui arrive, obligera l’euro à se réévaluer de facto. On peut donc redouter une exportation du chômage américain (et anglais) vers l’Europe, avec son cortège de misère, de crises sociales, voire politiques.

    L’histoire enseigne que la monnaie-papier n’est tout simplement pas viable à long terme. Une course pour le rétablissement de la convertibilité métallique est déjà engagée entre les grandes puissances du monde. Le premier qui rétablit l’étalon-or gagnera un afflux immédiat d’épargne permettant de financer sainement la relance. Il est imaginable que certains, aux Etats-Unis, tiennent le même raisonnement et pensent rétablir le Gold Exchange Standard de Bretton Woods pour perpétuer le privilège du dollar.

    Si l’Europe réussit ce coup de maître, facilité par l’euro, elle peut détourner vers elle l’épargne mondiale qui continue d’être drainée par les Etats-Unis, et retrouver la place au centre du système monétaire international qu’elle a perdue en 1914. Une manière de solder enfin les comptes du XXe siècle.