Ou comment une pratique humaine naturelle devient un crime aux yeux des collectivistes et des ingénieurs sociaux.
A son origine, le Club Méditerranée doit son formidable succès à son marketing touristique innovateur dans une industrie à l'époque balbutiante [1]. En effet, le Club avait comprit que, dans cette industrie comme dans les autres, il était périlleux de se tromper de cible et de mélanger des clientèles par nature hétérogènes. Cette observation est à l'origine de la multiplication des marques pour les biens de consommation ; et elle a donné naissance à la segmentation de clientèles dans les services. On peut juger la publicité nuisible et les marques inutiles mais leur existence démontre que les consommateurs ont un besoin d'identification et de distinction.
Pourtant, le Club Méditerranée a peu à peu abandonné ce positionnement sélectif qui a fait sa notoriété passée, entérinant une banalisation du produit touristique qui a aussi correspondu à une dévalorisation de la pratique touristique, dont le film « les bronzés » a popularisé les plus beaux (pires) clichés. Ce faisant, le groupe a compris récemment que cette stratégie n'était pas viable dans un secteur en perpétuelle mutation et qu'il était essentiel de reprendre en compte les aspirations des clients, revenant sur une pratique plus discriminante mais aussi plus valorisante. Puisque les gens aspirent à se différencier, les entreprises qui veulent se développer sont obligées de bien connaître leur cible de clientèle pour pouvoir écouler leurs produits. Les viticulteurs français, abrités par une protection illusoire, coulent aujourd'hui pour n'avoir pas compris ce principe élémentaire.
On ne s'adresse pas de la même manière à X ou Y. Ce n'est pas un jugement de valeur ; c'est un fait. Les économistes savent que les consommateurs se caractérisent par des préférences spécifiques, et que ces distinctions sont de plus en plus fines. Elles ne sont pas liées seulement à la catégorie socioprofessionnelle, l'âge ou le sexe. Chaque individu est unique.
Si les gens aspirent à se différencier et à ne pas se mélanger à l'aveuglette avec n'importe qui quand ils prennent des vacances, il est raisonnable de penser qu'ils auront les mêmes préoccupations et les mêmes réflexes dans le choix de leur domicile, de leur quartier de résidence, de l'école ou de l'université de leurs enfants.etc. C'est aussi par affinité (par sympathie aurait dit Adam Smith) qui se tissent les relations humaines qui font les liens sociaux les plus solides. Il est légitime que le créateur d'une entreprise choisisse avec qui il veut travailler de la même manière qu'un salarié choisisse son entreprise. Et il est périlleux d'imposer ce choix de l'extérieur, comme si un arbitrage était possible en dehors (ou au-dessus des acteurs concernés). A ce propos, l'imposition des 35 heures au secteur touristique français, au nom d'une vision de l'entreprise qui date de la lutte des classes, va finir de condamner un secteur qui est aujourd'hui déjà bien fragilisé par la mondialisation en cours.
Cessons de brandir au moindre prétexte les accusations de raciste ou de sexiste quand une décision d'autorité légitime n'arrange pas celui (ou celle) qui la subit. A force de dénigrer l'autorité naturelle (des parents sur les enfants, des patrons sur les salariés, du maître sur l'élève, des professeurs sur les étudiants...), on finit par briser le ciment spontané de l'ordre social comme le montre brillamment Rachid Kaci dans son remarquable livre [2]. Car cette aspiration naturelle choque nos ingénieurs sociaux et autres puissants démagogues pétris de ces diaboliques concepts collectivistes qui inspirent les programmes politiques de nos dirigeants actuels et futurs. Ces derniers, au nom de la mixité sociale, de la lutte contre la discrimination, ou de la peur du communautarisme, veulent forcer les populations à se mélanger à travers les plans d'urbanisation. Ils vont en outre imposer le choix des écoles (et des programmes) à travers la carte scolaire ; ils vont ensuite mélanger les touristes à travers le tourisme social. Dans ce contexte ambigu, les entreprises, qui par souci marketing intègrent la religion ou l'origine ethnique de leurs clients potentiels dans leurs pratiques commerciales, prennent aujourd'hui le risque d'être accusées de discriminations. Et l'on interdira bientôt la photo sur le C.V. pour éviter les pratiques discriminatoires à l'embauche.
Sans doute, devrais-je un jour consulter une haute autorité avant de choisir mes amis ? Mais rêvons un peu, si l'on empêcher les imbéciles et les hypocrites de faire des carrières politiques ? N'y a t il pas finalement des discriminations nécessaires et utiles ?
Jean-Louis Caccomo,
Perpignan, le 24 octobre 2006
http://caccomo.blogspot.com/
[1] Caccomo J.L., Solonandrasana B. [2006] L'innovation dans l'industrie touristique. Enjeux et stratégie. Deuxième édition, L'Harmattan, Paris.
[2] Kaci R. [2006] Lettre ouverte aux démagogues, Edition Broché, Paris.
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Discrimination