Où en est la zone euro depuis le début de la crise financière en 2008 ? Les derniers mois ont été éprouvants pour les économies européennes, certains responsables européens remettant même en cause la monnaie unique. Mais depuis l'entrée en action du fonds européen de stabilité financière et une timide reprise économique, les indicateurs semblent dessiner une conjoncture plus favorable pour l'Europe.
Le Financial times estime à cet effet que "le contexte est à l'euro-phorie". Ainsi, le retour de la confiance des investisseurs pourrait être encore accentué par une hausse imminente des capacités du fonds de sauvetage européen, renchérit Le Figaro. Le discours rassurant sur l'euro tenu hier par Nicolas Sarkozy au sommet de Davos aurait également contribué à rassurer les investisseurs analyse le quotidien français.
Dans une interview donnée au Wall street jounal, Olli Rhen souligne en effet que l'Europe se donne davantage de moyens de voler au secours de ses Etats en difficulté puisque "les Etats européens s'apprêtent à accroître la capacité de prêt du fonds de sauvetage européen, sans toutefois relever le fonds de garanties de 440 milliards d'euros".
D'un autre côté "les marchés plébiscitent les eurobonds" titre Libération. Les marchés se sont effectivement rués sur la première émission lancée par le Fonds européen de stabilité financière dans le cadre du plan de soutien à l’Irlande. "Alors que l’offre portait sur 5 milliards à 5 ans, la demande a atteint 44,5 milliards d’euros, soit neuf fois le montant proposé, un record mondial " note Libération. "Cela pourrait bien être un tournant de la crise : l’idée que l’euro pourrait disparaître ou se désintégrer est absurde et de plus en plus de gens dans les marchés en prennent conscience", analyse Klaus Regling, le patron du FESF.
Une embellie cependant contredit par la Commission européenne qui a mesuré un léger recul de "la confiance économique dans la zone euro après sept mois de hausse continue, pénalisée notamment par une nouvelle baisse du moral des consommateurs", rapporte l'agence AFP. "Malgré la hausse du moral des dirigeants du secteur industriel" celle-ci "n'a pas pu compenser la morosité accrue des consommateurs, au vu des chiffres publiés jeudi la Commission européenne" précise Reuters.
Il n'empêche que les acteurs politiques et économiques, après une succession de mauvaises nouvelles, clament à nouveau leur confiance dans la monnaie unique. En effet, "L'Europe aurait plongé dans une 'crise terrible' sans l'euro, ont estimé jeudi d'un commun accord plusieurs dirigeants de grands groupes réunis au Forum économique mondial à Davos" [AFP]. D'autres commentateurs partagent ce même sentiment. Maurice Levy, directeur général du géant français de la publicité Publicis a souligné que "le système européen a fonctionné plutôt bien et a prouvé sa résistance à ce type de crises". Il juge également que sans l'euro, l'Irlande et la Grèce auraient fait banqueroute. James Dimon, président et directeur général de la banque d'investissement JP Morgan estime quant à lui que "l'Union européenne est une des meilleures réalisations humaines de tous les temps".
Enfin, dans un élan très lyrique, le chef d'Etat français a déclaré au Forum de Davos que "jamais la France et l'Allemagne ne renonceront à l'euro, dont la disparition aurait des effets cataclysmiques". "La question de l'euro n'est pas seulement une question monétaire c'est une question identitaire" a-t-il lancé, bien en verve.
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2011 : L'année impitoyable, à la croisée des trois chemins du chaos mondial
GEAB N°51 est disponible! Crise systémique globale - 2011 : L'année impitoyable, à la croisée des trois chemins du chaos mondial
- Communiqué public GEAB N°51 (15 janvier 2011) -
Ce numéro 51 du GEAB marque le cinquième anniversaire de la publication du Global Europe Anticipation Bulletin. Or, en Janvier 2006, à l'occasion du GEAB N°1, l'équipe de LEAP/E2020 indiquait à l'époque qu'une période de quatre à sept ans s'ouvrait qui serait caractérisée par la « Chute du Mur Dollar », phénomène analogue à celui de la chute du Mur de Berlin qui entraîna dans les années suivantes l'effondrement du bloc communiste, puis celui de l'URSS. Aujourd'hui, dans ce GEAB N°51 qui présente nos trente-deux anticipations pour l'année 2011, nous estimons que l'année à venir sera une année charnière dans ce processus s'étalant donc entre 2010 et 2013. Elle sera en tout état de cause une année impitoyable car elle va en effet marquer l'entrée dans la phase terminale du monde d'avant la crise (1).
Depuis Septembre 2008, moment où l'évidence de la nature globale et systémique de la crise s'est imposée à tous, les Etats-Unis, et derrière eux les pays occidentaux, se sont contentés de mesures palliatives qui n'ont fait que masquer les effets de sape de la crise sur les fondements du système international contemporain. 2011 va, selon notre équipe, marquer le moment crucial où d'une part ces mesures palliatives voient leur effet anesthésiant s'évanouir tandis que, au contraire, vont brutalement surgir au premier plan les conséquences de la dislocation systémique de ces dernières années (2).
En résumé, 2011 va être marquée par une série de chocs violents qui vont faire exploser les fausses protections mises en place depuis 2008 (3) et qui vont emporter un à un les « piliers » sur lesquels reposent depuis des décennies le « Mur Dollar ». Seuls les pays, collectivités, organisations et individus qui ont réellement entrepris depuis trois ans de tirer les leçons de la crise en cours pour s'éloigner au plus vite des modèles, valeurs et comportements d'avant la crise, traverseront cette année indemnes ; les autres vont être emportés dans le cortège de difficultés monétaires, financières, économiques, sociales et politiques que réserve 2011.
Ainsi, comme nous considérons que 2011 sera globalement l'année la plus chaotique depuis 2006, date du début de nos travaux sur la crise, notre équipe s'est concentrée dans le GEAB N°51 sur les 32 anticipations de l'année 2011, qui comportent également nombre de recommandations pour faire face aux chocs à venir. C'est ainsi une sorte de carte prévisionnelle des chocs financiers, monétaires, politiques, économiques et sociaux des douze prochains mois qu'offre ce numéro du GEAB.
Si notre équipe estime que 2011 sera l'année la plus terrible depuis 2006, date du début de notre travail d'anticipation de la crise systémique, c'est parce qu'elle est à la croisée des trois chemins du chaos mondial. Faute de traitement de fond des causes de la crise, depuis 2008 le monde n'a fait que reculer pour mieux sauter.
Un système international exsangue
Le premier chemin que la crise peut prendre pour générer un chaos mondial, c'est tout simplement un choc violent et imprévisible. L'état de délabrement du système international est désormais tellement avancé que sa cohésion est à la merci de toute catastrophe d'envergure (4). Il suffit de voir l'incapacité de la communauté internationale à efficacement aider Haïti depuis un an (5), des Etats-Unis à reconstruire la Nouvelle Orléans depuis six ans, de l'ONU à régler les problèmes du Darfour, de la Côte d'Ivoire depuis une décennie, des Etats-Unis à faire avancer la paix au Proche-Orient, de l'OTAN à battre les Talibans en Afghanistan, du Conseil de Sécurité à maîtriser les questions coréenne et iranienne, de l'Occident à stabiliser le Liban, du G20 à mettre fin à la crise mondiale qu'elle soit financière, alimentaire, économique, sociale, monétaire, … pour constater que sur l'ensemble de la palette des catastrophes climatiques et humanitaires, comme des crises économiques et sociales, le système international est désormais impuissant.
En fait, depuis le milieu des années 2000 au moins, l'ensemble des grands acteurs mondiaux, au premier rang desquels se trouvent bien entendu les Etats-Unis et son cortège de pays occidentaux, ne fait plus que de la communication, de la gesticulation. Dans la réalité, rien ne va plus : la bille des crises tourne et chacun retient son souffle pour qu'elle ne tombe pas sur sa case. Mais progressivement la multiplication des risques et des thèmes de crise ont transformé la roulette de casino en roulette russe. Pour LEAP/E2020, le monde entier commence à jouer à la roulette russe (6), ou plutôt à sa version 2011 « la roulette américaine », avec cinq balles dans le barillet.
Evolution mensuelle de l'indice Alimentation de la FAO (2010) et des prix des principales denrées alimentaires (2009/2010) (base 100 : moyenne 2002-2004) - Source : FAO/Crikey, 01/2011L'envolée des prix des matières premières (alimentaires, énergétiques (7),...) doit nous rappeler 2008 (8). C'est en effet dans le semestre précédant l'effondrement de Lehman Brothers et de Wall Street que s'est situé le précédent épisode de fortes hausses des prix des matières premières. Et les causes actuelles sont de la même nature que celles d'hier : une fuite hors des actifs financiers et monétaires en faveur de placements « concrets ». Hier les gros opérateurs fuyaient les crédits hypothécaires et tout ce qui en dépendaient ainsi que le Dollar US ; aujourd'hui ils fuient l'ensemble des valeurs financières et les bons du Trésor (ç) et autres dettes publiques. Il faut donc s'attendre entre le Printemps 2011 et l'Automne 2011 à l'explosion de la quadruple bulle des bons du Trésor, des dettes publiques (10), des bilans bancaires (11) et de l'immobilier (américain, chinois, britannique, espagnol, … et commercial (12)) ; l'ensemble se déroulant sur fond de guerre monétaire exacerbée (13).
L'inflation induite par les Quantitative Easing américain, britannique et japonais et les mesures de stimulation des mêmes, des Européens et des Chinois va être l'un des facteurs déstabilisant de 2011 (14). Nous y revenons plus en détail dans ce GEAB N°51. Mais ce qui est désormais évident au regard de ce qui se passe en Tunisie (15), c'est que ce contexte mondial, notamment la hausse des prix des denrées et de l'énergie, débouche dorénavant sur des chocs sociaux et politiques radicaux (16). L'autre réalité que dévoile le cas tunisien, c'est l'impuissance des « parrains » français, italien ou américain pour empêcher l'effondrement d'un « régime-ami » (17).
Impuissance des principaux acteurs géopolitiques mondiaux
Et cette impuissance des principaux acteurs géopolitiques mondiaux est l'autre chemin que la crise peut utiliser pour générer un chaos mondial en 2011. En effet, on peut classer les principales puissances du G20 en deux groupes dont le point seul point commun est qu'ils ne parviennent pas à influencer les évènements de manière décisive.
D'un côté on a l'Occident moribond avec, d'une part, les Etats-Unis, dont l'année 2011 va démontrer que le leadership n'est plus qu'une fiction (voir dans ce GEAB N°51) et qui tentent de figer tout le système international dans sa configuration du début des années 2000 (18) ; et puis on a l'Euroland, « souverain » en gestation qui est actuellement essentiellement concentré sur son adaptation à son nouvel environnement (19) et son nouveau statut d'entité géopolitique émergente (20), et qui n'a donc ni l'énergie, ni la vision nécessaire pour peser sur les évènements mondiaux (21).
Et de l'autre côté, on trouve les BRIC (avec en particulier la Chine et la Russie) qui s'avèrent incapables pour l'instant de prendre le contrôle de tout ou partie du système international et dont la seule action se limite donc à saper discrètement ce qui reste des fondements de l'ordre d'avant la crise (22).
En fin de compte, c'est donc l'impuissance qui se généralise (23) au niveau de la communauté internationale, renforçant non seulement le risque de chocs majeurs, mais également l'importance des conséquences de ces chocs. Le monde de 2008 a été pris par surprise par le choc violent de la crise, mais le système international était paradoxalement mieux équipé pour réagir car organisé autour d'un leader incontesté (24). En 2011, ça n'est plus le cas : non seulement il n'y a plus de leader incontesté, mais le système est exsangue comme on l'a vu précédemment. Et la situation est encore aggravée par le fait que les sociétés d'un grand nombre de pays de la planète sont au bord de la rupture socio-économique.
Des sociétés au bord de la rupture socio-économique
C'est en particulier le cas aux Etats-Unis et en Europe où trois ans de crise commencent à peser très lourd dans la balance socio-économique, et donc politique. Les ménages américains désormais insolvables par dizaines de millions oscillent entre pauvreté subie (25) et rage anti-système. Les citoyens européens, coincés entre chômage et démantèlement de l'Etat-providence (26), commencent à refuser de payer les additions des crises financières et budgétaires et entreprennent de chercher des coupables (banques, Euro, partis politiques de gouvernement, …).
Mais parmi les puissances émergentes aussi, la transition violente que constitue la crise conduit les sociétés vers des situations de rupture : en Chine, la nécessité de maîtriser les bulles financières en développement se heurte au désir d'enrichissement de secteurs entiers de la société comme au besoin d'emploi de dizaines de millions de travailleurs précaires ; en Russie, la faiblesse du filet social s'accommode mal de l'enrichissement des élites, tout comme en Algérie agitée par des émeutes. En Turquie, au Brésil, en Inde, partout la transition rapide que connaissent ces pays déclenche émeutes, protestations, attentats. Pour des raisons parfois antinomiques, développement pour les unes, appauvrissement pour les autres, un peu partout sur la planète nos différentes sociétés abordent 2011 dans un contexte de fortes tensions, de ruptures socio-économiques qui en font donc des poudrières politiques.
C'est sa position à la croisée de ces trois chemins qui fait ainsi de 2011 une année impitoyable. Et impitoyable elle le sera pour les Etats (et les collectivités locales) qui ont choisi de ne pas tirer les difficiles leçons des trois années de crise qui ont précédé et/ou qui se sont contentés de changements cosmétiques ne modifiant en rien leurs déséquilibres fondamentaux. Elle le sera aussi pour les entreprises (et pour les Etats (27)) qui ont cru que l'embellie de 2010 était le signe d'un retour « à la normale » de l'économie mondiale. Et enfin elle le sera pour les investisseurs qui n'ont pas compris que les valeurs d'hier (titres, monnaies, ….) ne pouvaient pas être celles de demain (en tout cas pour plusieurs années). L'Histoire est généralement « bonne fille ». Elle donne souvent un coup de semonce avant de balayer le passé. Cette fois-ci, elle a donné le coup de semonce en 2008. Nous estimons qu'en 2011, elle donnera le coup de balai. Seuls les acteurs qui ont entrepris, même laborieusement, même partiellement, de s'adapter aux nouvelles conditions générées par la crise pourront tenir ; pour les autres le chaos est au bout du chemin.
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Notes:
(1) Ou du monde tel qu'on le connaît depuis 1945 pour reprendre notre description de 2006.
(2) La récente décision du ministère du Travail américain d'étendre à cinq ans la mesure du chômage de longue durée dans les statistiques de l'emploi US, au lieu du maximum de deux ans jusqu'à maintenant, est un bon indicateur de l'entrée dans une étape nouvelle de la crise, une étape qui voit disparaître les « habitudes » du monde d'avant. D'ailleurs, le gouvernement américain cite « la montée sans précédent » du chômage de longue durée pour justifier cette décision. Source : The Hill, 28/12/2010
(3) Ces mesures (monétaires, financières, économiques, budgétaires, stratégiques) sont désormais étroitement connectées. C'est pourquoi elles seront emportées dans une série de chocs successifs.
(4) Source : The Independent, 13/01/2011
(5) C'est même pire puisque c'est l'aide internationale qui a apporté le choléra dans l'île, faisant des milliers de morts.
(6) D'ailleurs Timothy Geithner, le ministre américain des Finances, peu connu pour son imagination débordante, vient d'indiquer que « le gouvernement américain pouvait avoir à nouveau à faire des choses exceptionnelles », en référence au plan de sauvetage des banques de 2008. Source : MarketWatch, 13/01/2011
(7) D'ailleurs l'Inde et l'Iran sont en train de préparer un système d'échange « or contre pétrole » pour tenter d'éviter des ruptures d'approvisionnement. Source : Times of India, 08/01/2011
(8) L'indice FAO des prix alimentaires vient de dépasser en Janvier 2011 (à 215) son précédent record de Mai 2008 (à 214).
(9) Les banques de Wall Street se débarrassent actuellement à très grande vitesse (sans équivalent depuis 2004) de leurs Bons du Trésor US. Leur explication officielle est « l'amélioration remarquable de l'économie US qui ne justifie plus de se réfugier sur les Bons du Trésor ». Bien entendu, vous êtes libres de les croire comme le fait le journaliste de Bloomberg du 10/01/2011.
(10) Ainsi l'Euroland avance déjà à grand pas sur le chemin décrit dans le GEAB N°50 d'une décote en cas de refinancement des dettes d'un Etat-membre ; tandis que désormais les dettes japonaise et américaine s'apprêtent à entrer dans la tourmente. Sources : Bloomberg, 07/01/2011 ; Telegraph, 05/01/2011
(11) Nous estimons que d'une manière générale les bilans des grandes banques mondiales contiennent au moins 50% d'actifs-fantômes dont l'année à venir va imposer une décote de 20% à 40% du fait du retour de la récession mondiale avec l'austérité, de la montée des défauts sur les prêts des ménages, des entreprises, des collectivités, des Etats, des guerres monétaires et de la reprise de la chute de l'immobilier. Les « stress-tests » américain, européen, chinois, japonais ou autres peuvent toujours continuer à tenter de rassurer les marchés avec des scénarios « Bisounours » sauf que cette année c'est « Alien contre Predator » qui est au programme des banques. Source : Forbes, 12/01/2011
(12) Chacun de ces marchés immobiliers va encore fortement baisser en 2011 pour ceux qui ont déjà entamer leur chute ces dernières années, ou dans le cas chinois, va entamer son dégonflement brutal sur fond de ralentissement économique et de rigueur monétaire.
(13) L'économie japonaise est d'ailleurs l'une des premières victimes de cette guerre des monnaies, avec 76% des chefs d'entreprises des 110 grandes sociétés nippones sondées par Kyodo News se déclarant désormais pessimistes pour la croissance japonaise en 2011 suite à la hausse du Yen. Source : JapanTimes, 04/01/2011
(14) Voici quelques exemples édifiants rassemblés par l'excellent John Rubino. Source : DollarCollapse, 08/01/2011
(15) Pour rappel, dans le GEAB N°48, du 15/10/2010, nous avions classé la Tunisie dans les « pays à risques importants » pour 2011.
(16) Nul doute d'ailleurs que l'exemple tunisien génère une salve de réévaluation parmi les agences de notation et les « experts en géopolitiques » qui, comme d'habitude, n'ont rien vu venir. Le cas tunisien illustre également le fait que ce sont désormais les pays satellites de l'Occident en général, et des Etats-Unis en particulier, qui sont sur le chemin des chocs de 2011 et des années à venir. Et il confirme ce que nous répétons régulièrement, une crise accélère tous les processus historiques. Le régime Ben Ali, vieux de vingt-trois ans, s'est effondré en quelques semaines. Quand l'obsolescence politique est là, tout bascule vite. Or c'est l'ensemble des régimes arabes pro-occidentaux qui est désormais obsolète à l'aune des évènements de Tunisie.
(17) Nul doute que cette paralysie des « parrains occidentaux » va être soigneusement analysée à Rabat, au Caire, à Djeddah et Amman par exemple.
(18) Configuration qui leur était la plus favorable puisque sans contrepoids à leur influence.
(19) Nous y revenons plus en détail dans ce numéro du GEAB, mais vu de Chine, on ne s'y trompe pas. Source : Xinhua, 02/01/2011
(20) Petit à petit les Européens découvrent qu'ils sont dépendants d'autres centres de pouvoir que Washington. Pékin, Moscou, Brasilia, New Delhi, … entrent très lentement dans le paysage des partenaires essentiels. Source : La Tribune, 05/01/2011 ; Libération, 24/12/2010 ; El Pais, 05/01/2011
(21) Toute l'énergie du Japon est concentrée sur sa tentative désespérée de résister à l'attraction chinoise. Quant aux autres pays occidentaux, ils ne sont pas en mesure d'influer significativement sur les tendances mondiales.
(22) La place du Dollar US dans le système mondial fait partie de ces derniers fondements que les BRIC érodent activement jour après jour.
(23) En matière de déficit, le cas américain est exemplaire. Au-delà du discours, tout continue comme avant la crise avec un déficit en gonflement exponentiel. Pourtant même le FMI tire désormais la sonnette d'alarme. Source : Reuters, 08/01/2011
(24) D'ailleurs même le Wall Street Journal du 12/01/2011, se faisant l'écho du Forum de Davos, s'inquiète de l'absence de coordination internationale, qui est en soi un risque majeur pour l'économie mondiale.
(25) Des millions d'Américains découvrent les banques alimentaires pour la première fois de leur vie, tandis qu'en Californie, comme dans de nombreux autres états, le système éducatif se désagrège rapidement. En Illinois, les études sur le déficit de l'Etat le comparent désormais au Titanic. 2010 bat le record des saisies immobilières. Sources : Alternet, 27/12/2010 ; CNN, 08/01/2011 ; IGPA-Illinois, 01/2011 ; LADailyNews, 13/01/2011
(26) L'Irlande qui est face à une reconstruction pure et simple de son économie est un bon exemple de situations à venir. Mais même l'Allemagne, aux résultats économiques pourtant remarquables actuellement, n'échappe pas à cette évolution comme le montre la crise du financement des activités culturelles. Tandis qu'au Royaume-Uni, des millions de retraités voient leurs revenus amputés pour la troisième année consécutive. Sources : Irish Times, 31/12/2010 ; Deutsche Welle, 03/01/2011 ; Telegraph, 13/01/2011
(27) A ce sujet, les dirigeants américains confirment qu'ils foncent tout droit dans le mur des dettes publiques, faute d'anticiper les difficultés. En effet la récente déclaration de Ben Bernanke, le patron de la FED, dans laquelle il affirme que la Fed n'aidera pas les Etats (30% de baisse des revenus fiscaux en 2009 d'après le Washington Post du 05/01/2011) et les villes qui croulent sous les dettes, tout comme la décision du Congrès d'arrêter l'émission des « Build American Bonds » qui ont évité aux Etats de faire faillite ces deux dernières années, illustrent un aveuglement de Washington qui n'a d'équivalent que celui dont Washington a fait preuve en 2007/2008 face à la montée des conséquences de la crise des « subprimes ». Sources : Bloomberg, 07/01/2011 ; WashingtonBlog 13/01/2011
Samedi 15 Janvier 2011
GEAB N°51 - Sommaire
- Publié le 15 janvier 2011 -
Crise systémique globale - 2011 : L'année impitoyable
Ce numéro 51 du GEAB marque le cinquième anniversaire de la publication du Global Europe Anticipation Bulletin. Or, en Janvier 2006, à l'occasion du GEAB N°1, l'équipe de LEAP/E2020 indiquait à l'époque qu'une période de quatre à sept ans s'ouvrait qui serait caractérisée par la « Chute du Mur Dollar », phénomène analogue à celui de la chute du Mur de Berlin qui entraîna dans les années suivantes l'effondrement du bloc communiste, puis celui de l'URSS. Aujourd'hui, dans ce GEAB N°51 qui présente nos trente-deux anticipations pour l'année 2011, nous estimons que l'année à venir sera une année charnière dans ce processus s'étalant donc entre 2010 et 2013… (page 2)
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2011 – A la croisée des trois chemins du chaos mondial
Si notre équipe estime que 2011 sera l'année la plus terrible depuis 2006, date du début de notre travail d'anticipation de la crise systémique, c'est parce qu'elle est à la croisée des trois chemins du chaos mondial. Faute de traitement de fond des causes de la crise, depuis 2008 le monde n'a fait que reculer pour mieux sauter… (page 3)
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ANTICIPATIONS 2011 : ‘17-UP AND 15-DOWN’, TRENTE-DEUX TENDANCES-CLES POUR 2011 - Dix-sept thèmes qui vont monter en puissance au cours de l’année 2011 / Quinze sujets clés de 2010 qui vont s’évanouir d’ici la fin 2011 (recommandations incluses)
L’instabilité politique aux Etats-Unis, Les régimes arabes pro-occidentaux, Obama, Sarkozy et Berlusconi, Le sauvetage du Royaume-Uni et le tandem Cameron/Clegg, Verts en Allemagne et Front National en France, Logique de « blocs géopolitiques », Le rôle de l'or dans le système monétaire international, Les prix de l’immobilier, L’internationalisation du Yuan, Bons du Trésor US et dettes publiques occidentales, Intérêt des placements financiers, Taux d’intérêt, Le « Quantitative Easing » comme solution à la crise, Les contrôles des changes et autres formes de protections financière, Leadership américain, Interventionnisme US en Amérique latine, La cohésion de l'OTAN en Afghanistan, La reprise, La capacité du G20 à réformer le système monétaire international, Inflation, Les « attaques » de la Fed (et le Mur Dollar), Le rôle international des BRIC, monétaire et commerciale, Les faillites d'Etats et de collectivités locales US, Les miracles économiques chinois et allemand, L'intégration fiscale, économique et financière de l'Euroland, Crise de l’Euro, Le multiculturalisme en Europe, La valeur des banques, salaires et des retraites dans les pays développés, Chômage et violence sociale, Les systèmes de protection sociale, La consommation des ménages occidentaux (page 7)
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Le GlobalEurometre - Résultats & Analyses
En matière d'inflation, une fois n'est pas coutume, on constate la poursuite de la tendance du mois précédent à savoir une majorité renforcée qui pense que l'inflation est de retour (81% contre 65% en Décembre)… (page 22)
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Le libéralisme pour les nuls
Source : http://www.contrepoints.org/2011/01/14/11088-le-liberalisme-pour-les-nuls Publié le 14/01/2011
L’économiste Bradford DeLong a estimé le PIB mondial par habitant depuis l’apparition de l’humain sur terre (voir graphique ci-bas). [1] Le constat qui en découle est stupéfiant : le niveau de vie des humains a véritablement stagné pendant 2,5 millions d’années, pour ensuite exploser à la hausse vers la fin du 18e siècle. En fait, l’humain moyen de 1750 avait un niveau de vie plus près de l’homme de Cro-magnon que de l’humain moderne de 2010 !
Que s’est-il donc passé au 18e siècle pour déclencher une telle amélioration du niveau de vie des humains ? Le principal moteur de création de richesse est la liberté économique. Se pourrait-il donc qu’une augmentation drastique de la liberté économique se soit produite au 18e siècle, engendrant une croissance économique et une prospérité jamais vue auparavant ? C’est en effet ce qui s’est produit !
Celui que l’on considère comme le père du libéralisme est un philosophe anglais du nom de John Locke. Dans ses publications de la fin du 17e siècle, Locke démontrait que la propriété est un droit naturel de l’humain, étant le résultat de son travail. Il affirmait que c’est du peuple que l’État obtient son pouvoir de gouverner, et non d’une autorité supernaturelle ou divine, tel que le prétendait la monarchie à l’époque. Comme le peuple ne peut octroyer à l’État un pouvoir qu’il ne détient pas, il en va de soi que le pouvoir de l’État ne puisse pas excéder le pouvoir des individus qu’il gouverne. Le pouvoir de l’État doit être limité et non-arbitraire.
Les idées de Locke ont servi de base aux révolutions qui ont eu lieu à travers le monde durant le Siècle des Lumières (1688-1789). Il y eut d’abord la Révolution Glorieuse en Angleterre (1688), qui fut suivie de l’établissement du Parlement et de la charte des droits, ainsi que d’une réduction du pouvoir arbitraire de la monarchie. Il y eut aussi la Révolution Française (1789) et, bien entendu, la Révolution Américaine (1776), dont la Déclaration d’Indépendance et la constitution furent directement inspirées des écrits de Locke, qui eut une grande influence sur les Pères Fondateurs.
Ces révolutions ont eu comme impact d’anéantir la féodalité et d’abolir les diverses monarchies absolues à travers l’Europe, libérant ainsi le peuple de cette oppression économique et politique. Ces nouveaux systèmes politiques allaient être basés sur l’égalité de tous les citoyens devant la loi (« rule of law »), les droits individuels et la propriété privée.
Le système économique qui allait émerger découla des idées d’un dénommé Adam Smith, qui publiait en 1776 l’oeuvre la plus influente de tous les temps dans la sphère économique : La Richesse des Nations. [2] Smith y décrivait l’importance de la spécialisation du travail pour augmenter la production et donc créer de la richesse. Il y défendait aussi le libre-échange, alors qu’à l’époque le protectionnisme était très bien ancré dans les politiques économiques mercantilistes des nations. Il y constatait qu’une économie basée sur le libre-marché était plus productive et enrichissante pour la société. Il y décrivait finalement un système économique basé sur la propriété et sur la « liberté naturelle » qui allait plus tard être nommé « capitalisme ». Les bases théoriques du capitalisme libéral allaient par la suite se renforcir grâce aux travaux du Français Jean-Baptiste Say (loi des débouchés) et de l’Anglais David Ricardo (loi des avantages comparatifs).
C’est donc grâce à la libéralisation de l’économie mondiale que le niveau de vie des humains a été catapulté à des niveaux incroyables par rapport à ce qui avait été observé depuis l’aube de l’humanité. La pauvreté, telle que définie en 1750, a été pratiquement éradiquée dans les pays ayant participé à cette libéralisation. Cependant, bien que l’ensemble de la population ait bénéficié de cette immense création de richesse, certains en ont bénéficié plus que d’autres. Cette inégalité a engendré une certaine jalousie chez certains, ce qui a créé une opportunité pour les politiciens d’augmenter leur popularité en séduisant les moins nantis par des mesures de redistribution de richesse. C’est ainsi qu’un renversement de la tendance vers la libéralisation et l’enrichissement collectif a commencé à s’orchestrer.
Ainsi, l’État-providence serait né en Allemagne vers 1880, alors que le chancelier Otto Von Bismark a introduit divers programmes sociaux pour « acheter » la loyauté du peuple envers l’empereur et son régime. [3] Cela n’est pas passé inaperçu du regard des politiciens américains, qui ont commencé à instaurer des programmes pour les vétérans. Ces programmes ont été constamment élargis au fur et à mesure que les politiciens constataient leur efficacité à sécuriser le soutien électoral.
Ceci étant dit, c’est le New Deal de Franklin D. Roosevelt qui a vraiment fait avancer l’État-providence aux États-Unis, notamment avec le Social Security Act de 1935. Ces idées bourgeonnaient depuis longtemps dans l’esprit des socialistes américains et la Grande Dépression allait leur fournir la justification idéale pour les instaurer. Par la suite, les budgets associés au Social Security Actont été augmenté à chaque élection par des politiciens opportunistes. Le salaire minimum fut introduit en 1938. Le Food Stamp Act en 1964. Les programmes d’assurance-santé Medicare et Medicaid furent instaurés en 1965. Depuis ce temps, la couverture de ces programmes n’a cessé d’augmenter au fil des élections. En 2000, le gouvernement américain couvrait 43% des dépenses médicales alors que c’était seulement 21% en 1960. [4]
Au Québec, c’est la Révolution Tranquille qui, durant les années 1960s, a instauré des programmes sociaux, dans le but de sortir la nation de la « grande noirceur ». Pourtant, les choses n’étaient pas si sombres à l’époque. À la veille de la Révolution Tranquille, le Québec n’avait rien d’une société sous-développée. La moitié des francophones occupaient un emploi dans le secteur des services. Durant tout le 20e siècle, la proportion de travailleurs québécois oeuvrant dans le secteur industriel fut comparable aux proportions observées aux États-Unis et dans plusieurs pays européens. On ne constatait pas non plus de retard d’urbanisation dans la province. Le Québec affichait même un taux d’urbanisation supérieur à celui l’Ontario de 1900 jusqu’à la Deuxième Guerre mondiale, et allait se maintenir au-dessus de la moyenne canadienne par la suite. La société québécoise d’avant la Révolution Tranquille comptait aussi de nombreux entrepreneurs francophones dans le domaine industriel et commercial. Dès le 19e siècle, ils se dotent d’institutions financières soutenant l’essor économique régional: banques, sociétés de fiducie et compagnies d’assurance. Les chambres de commerce foisonnaient et se regroupèrent en fédération provinciale dès 1909. En 1935, elle comptait 49 chambres affiliées. En 1953, le Québec affichait le deuxième revenu par habitant le plus élevé au monde après les États-Unis (en excluant le reste du Canada). [5] Dans les circonstances, comment peut-on parler de « grande noirceur »?
Néanmoins, c’est pour s’attirer les votes d’une majorité montante qu’était la génération des « baby-boomers », dont les revenus étaient inférieurs vu leur jeunesse, que les politiciens de l’époque menés par Jean Lesage ont mis en place ces programmes sociaux. Ces réformes ont touché la santé, les services sociaux, l’éducation, la culture et l’interventionnisme économique, notamment par la création de la Régie des Rentes, de la Caisse de Dépôts et par la nationalisation de l’électricité sous Hydro-Québec. L’État-providence québécois n’a pratiquement pas cessé de prendre de l’expansion depuis; intervenant dorénavant dans toutes les sphères de nos vies.
Trop occupés à redistribuer la richesse qu’ils subtilisent pour mousser leur carrière, les politiciens oublient ce qui a permis de créer cette richesse au préalable : la libre coopération des individus cherchant à améliorer leur sort. Pour justifier leurs actes, ils accusent, de façon boiteuse, le capitalisme de tous les maux de la terre: inégalités, crises financières, fraude, corruption, destruction de l’environnement, etc. Ils ne se rendent pas compte que ce sont leurs interventions qui créent ces problèmes en premier lieu et que leurs interventions subséquentes visant à corriger le tir ne font qu’empirer les choses.
La marche arrière vers le vrai capitalisme libéral n’est pas une solution pour eux puisque cela signifierait une diminution de la taille de leur empire et donc de leur prestige et de leur influence, les raisons mêmes de leur implication en politique. Sans oublier le fait qu’il n’est pratiquement pas possible de se faire élire avec un programme visant la réduction de la taille de l’État puisque trop d’électeurs y perdraient au change étant dépendants d’une façon ou d’une autre de l’État.
Bien entendu, la taille de l’État a connu quelques courtes périodes de régression au cours des 30 dernières années aux États-Unis, au Canada et au Québec, sous les gouvernements de Reagan, Clinton, Chrétien et Charest. Cependant, ces brefs et timides épisodes n’ont été que des accidents de parcours et n’ont pas changé la tendance de croissance de l’État. Bien que le socialisme totalitaire ne persiste plus qu’à Cuba, en Chine et en Corée du Nord, le socialisme démocratique continue de progresser. Néanmoins, la croissance économique mondiale a grandement bénéficié de la libéralisation lente et graduelle de la Chine, de l’Inde, de la Russie, du Chili et du Brésil depuis les années ’80. Cependant, plutôt que de s’en réjouir, les pays industrialisés les perçoivent comme une menace et interviennent défavorablement à leur égard ; nuisant à la coopération économique mondiale et surtout à leur propre population.
Les programmes sociaux déresponsabilisent les individus et les rendent dépendants de l’État. Ils ne contribuent pas à éradiquer la pauvreté, mais plutôt à entretenir celle-ci. Ils détruisent la richesse et encourage le parasitisme. Comme disait le disait Bastiat : « L’État, c’est la grande fiction à travers laquelle tout le monde s’efforce de vivre aux dépens de tout le monde. »
Évidemment, ces programmes de dépenses, aujourd’hui gigantesques, ont dû être financés, d’abord par des taxes et impôts croissants, puis par l’endettement et la création de monnaie. Ce n’est pas pour rien que les banques centrales des États-Unis et du Canada ont été créées au début du 20esiècle, en même temps que la progression de l’État-providence. Nous avons donc observé une augmentation constante de l’endettement gouvernemental dans les pays industrialisés.
Il y a quelques décennies, cet endettement était soutenu par une croissance économique plus ou moins forte, aidée par une bonne croissance démographique, et donc par l’augmentation des recettes fiscale de l’État, mais dans les années 2000s, un gros problème s’est pointé à l’horizon. Nés en 1946, les premiers baby-boomers ont fêté leur 65e anniversaire en 2010-2011 et auront atteint l’âge normal de la retraite, alors que plusieurs d’entre eux bénéficient d’une retraite anticipée. Nous observons donc une baisse de la population active et une augmentation de la population inactive. Selon le scénario de référence de l’Institut de la statistique du Québec (ISQ), en 2031, il y aura deux travailleurs pour un retraité. En 2001, ce ratio était de cinq travailleurs pour un retraité.
En quoi cela est-il un problème ? Si la population active diminue, la production aussi diminue, ce qui est un problème majeur pour l’État puisque ses recettes fiscales diminueront alors que ses dépenses continueront d’augmenter. En outre, les retraités sont de grands consommateurs de services sociaux, surtout en santé. Cette situation est exacerbée par les mauvais rendements des caisses de retraite ces dernières années ainsi que par les mauvais rendements boursiers durant la dernière décennie, qui ont grugé le peu d’épargne existant. D’ailleurs, au 20e siècle, les banques centrales ont créé de la monnaie à profusion pour stimuler l’économie, faisant baisser les taux d’intérêt pour encourager l’endettement au détriment de l’épargne. Le résultat est que la population est endettée et dispose de peu de fonds pour la retraite.
Devant ces faits, les programmes sociaux de l’État apparaissent insoutenables. D’ailleurs, la plupart des pays industrialisés voient leurs gouvernements rapporter des déficits budgétaires chroniques. Autrement dit, on s’endette pour payer « l’épicerie ». Le niveau d’endettement de ces pays a atteint un niveau qui donne la frousse aux marchés financiers. Nous avons vu les problèmes financiers encourus par la Grèce et plusieurs autres pays européens en 2010. Il est à prévoir que d’autres pays se retrouveront dans cette situation bientôt, incluant les États-Unis, le Royaume-Uni, la France et le Québec.
Ces pays font alors face à trois choix : hausser les taxes et impôts au risque de grandement nuire à l’économie ; monétiser la dette en créant de la monnaie au risque de générer de l’hyper-inflation et de provoquer une forte hausse des taux d’intérêt qui nuirait à l’économie et aux finances de l’État ; ou réduire les dépenses au risque de se mettre les dépendants de l’État et les fonctionnaires à dos, un véritable suicide politique. Il y a fort à parier que les deux premières solutions seront considérées par les politiciens, même si cela impliquera la dilapidation du capital productif de l’économie, lequel permet de générer la richesse.
Les bénéficiaires des largesses du gouvernement que sont les fonctionnaires, les assistés sociaux et tous ces groupes de pression qui financent les campagnes des politiciens dans le but d’en soutirer des privilèges, continueront de protéger leurs acquis au détriment du reste de la population puisqu’ils détiennent l’hégémonie sur le processus électoral. L’intervention de l’État dans la sphère monétaire dans le but de maintenir une inflation positive et constante continuera d’affaiblir le pouvoir d’achat des gens et de générer de l’endettement, des bulles spéculatives et de violents cycles économiques se terminant par de terribles récessions. Depuis la crise financière de 2008, la règlementation et le protectionnisme sont aussi en forte progression dans le monde, au détriment de la liberté économique.
En somme, la progression de l’interventionnisme étatique au détriment de la liberté économique est en train d’atteindre son apogée. Le choc démographique pourrait très bien sonner le glas de l’État-providence, qui est déjà en faillite, mais quelle sera l’ampleur des dommages à notre niveau de vie d’ici là ?
La solution
La solution à cet impasse est fort simple : l’État doit se rétracter et cesser d’intervenir dans l’économie, lassant le champ libre aux créateurs de richesse.
Tout d’abord, l’État doit cesser de manipuler la monnaie et abolir la politique monétaire. Un retour à l’étalon-or ou la solution de Milton Friedman devraient être considérés. L’État doit cesser d’agir en tant que prêteur de dernier recours pour les banques, ce qui leur permet d’opérer avec de faibles réserves. De plus, les droits de propriété des déposants doivent être respectés par les banques (c’est-à-dire que les banques doivent cesser de s’approprier les dépôts à vue pour les utiliser à leur avantage). Ainsi, l’ampleur des bulles et des boums économiques serait fortement réduite et le capital cesserait d’être gaspillé à des fins non-productives.
En second lieu, l’État doit libérer le commerce international ; c’est-à-dire anéantir unilatéralement l’ensemble des mesures protectionnistes encore en vigueur. Cela aura comme impact de grandement augmenter le pouvoir d’achat de la population et de rendre nos entreprises plus compétitives.
Troisièmement, l’État doit diminuer ses dépenses de façon à pouvoir diminuer le fardeau fiscal des contribuables. Nous pourrions commencer par les dépenses militaires, qui devraient être strictement limitées à la défense préventive du pays. L’élimination totale des subventions aux entreprises serait aussi de mise.
Évidemment, il faudrait aussi que l’État réduise l’ampleur de sa dispendieuse bureaucratie. Une bonne façon d’y parvenir serait par la privatisation de certains services publics. Les entreprises privées sont motivées par le profit, ce qui implique qu’elles ne peuvent pas se permettre d’entretenir une trop lourde bureaucratie. La bureaucratie est présentement omniprésente dans les systèmes de santé et d’éducation du Québec, alors que ces ministères accaparent la part du lion des dépenses du gouvernement. Notez que le financement public de ces services n’implique pas nécessairement que la prestation du service doive aussi être publique.
L’autre façon de réduire la bureaucratie est de réduire la règlementation excessive qui non seulement constitue une entrave à des échanges volontaires entre individus consentants et crée des distorsions néfastes, mais nuit aussi au dynamisme de l’économie et donc à notre niveau de vie. La règlementation du marché du travail devrait notamment être allégée et le pouvoir excessif des syndicats réduit.
Finalement, les programmes sociaux devraient être simplifiés et réduits de façon à maintenir un certain « filet de sécurité » pour les moins bien nantis sans toutefois entretenir une classe parasitaire et influencer le comportement des individus. À cet égard, le revenu minimum du citoyen ou l’impôt négatif sont des solutions à considérer.
Ces réductions de dépenses pourraient être utilisées pour réduire les taxes et impôts. Une bonne partie de cette réduction du fardeau fiscal serait réinvestie dans le capital productif de l’économie à travers l’épargne, contribuant ainsi à augmenter notre niveau de vie. L’introduction d’un taux d’imposition fixe serait aussi souhaitable, de façon à ne plus décourager la prise de risque, le travail et l’excellence, de même qu’une simplification de la loi de l’impôt.
La démocratie est malade. Nous sommes menés par des politiciens corrompus qui dispose de plus de pouvoir que jamais au cours des 150 dernières années. Ils abusent constamment de leur pouvoir, menés par des groupes de pression qui font passer leurs intérêts au détriment de ceux de la population. Le système politique est complètement monopolisé par des socialistes de gauche et des socialistes de droite, qui croient que le gouvernement est la solution à tous nos problèmes alors que le gouvernement EST le problème ; par des partis biens financés qui dilapident l’argent des contribuables pour acheter les clientèles électorales nécessaires à garder le pouvoir. La démocratie est en train de devenir une forme de viol collectif dans lequel les violeurs, qui sont en majorité, n’ont que faire des objections de la pauvre victime, les simples contribuables.
Alexis de Tocqueville l’expliquait déjà dans De la Démocratie en Amérique, publié en 1835. Dans cette oeuvre célèbre, il fait l’analyse de la démocratie aux États-Unis, ce jeune pays libre regorgeant d’entrepreneurs dynamiques et individualistes : « La république américaine durera jusqu’au jour ou le Congrès découvrira qu’il peu corrompre le public avec l’argent du public. »
Le confort relatif qui a rendu la population indifférente à cette problématique n’est pas là pour rester. Il est impératif que la population réalise que nous sommes bien engagés sur la route de la servitude et de la pauvreté.
Notes :
[1] « Estimating world GDP, one million B.C. to present », Bradford DeLong, University of California, Berkeley.
[2] “An Inquiry into the Nature and Causes of the Wealth of Nations”, Adam Smith, 1776.
[3] « The Welfare State and the Promise of Protection”, Robert Higgs, Mises Institute, 24 août 2009.
[4] « What’s Really Wrong with the Healthcare Industry”, Vijay Boyapati, Mises Institute, 26 mai 2010.
[5] « La Révolution Tranquille, Rupture ou Tournant? », Jacques Rouillard, Journal of Canadian Studies/Revue d’études canadiennes, vol. 32, 4 (hiver 1998), p. 23-51.