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Angela Merkel conditionne l'avenir de l'Europe au succès du plan grec

La chancelière allemande a mis en garde contre un risque de contagion des difficultés de financement de la Grèce à d'autres pays de la zone euro. Pierre Lellouche et son homologue allemand devraient se rendre à Athènes la semaine prochaine.

Avec EurActiv

Alors que les manifestations du mercredi 5 mai contre le plan d'austérité adopté par le FMI et l'UE ont fait trois morts à Athènes, la chancelière allemande a estimé lors du débat au Bundestag sur l'aide de Berlin aux Grecs, que le succès du plan grec déterminerait "rien de moins que l'avenir de l'Europe, et avec lui, l'avenir de l'Allemagne dans l'Europe."

Selon Angela Merkel, d'autres pays pourraient connaître le même sort que la Grèce si Athènes ne parvenait pas à se sortir de ses difficultés malgré le plan de l'Union européenne et du FMI. Le jour même, l'agence de notation Moody's a annoncé qu'elle envisageait d'abaisser la note souveraine du Portugal "dans les trois mois" en raison de la "récente détérioration des finances publiques et des faibles perspectives de croissance à long terme" du pays.

La crainte d'une crise généralisée de la dette souveraine dans la zone euro fait chuter les bourses qui ont terminé en baisse mercredi, le dollar ayant atteint son plus fort niveau (1,2857) par rapport à l'euro depuis mars 2009.

"Nous sommes à un carrefour", a poursuivi la chancelière. Avant d'ajouter que la Grèce devait recevoir l'aide promise pour empêcher qu'une réaction en chaîne ne menace de déstabiliser le système financier international et européen.

Interrogé par EurActiv.fr sur ces propos, Benjamin Carton, économiste au Cepii a indiqué que cette déclaration, "peut être la plus importante depuis quinze ans", pouvait vouloir dire deux choses : "soit nous allons tout faire pour que ce plan fonctionne, soit, si cela ne marche pas, l'Allemagne et non la Grèce, quittera la zone euro". Une telle situation ferait évidemment éclater la zone euro. Reste que la réussite du plan d'aide à la Grèce pourra difficilement être évaluée avant deux ans, estime Benjamin Carton.

Mercredi, le secrétaire d'Etat aux Affaires européennes, Pierre Lellouche, a indiqué qu'il se rendrait vraisemblablement la semaine prochaine en Grèce avec son homologue allemand Werner Hoyer.

Il faut que "le gouvernement grec et les Grecs acceptent de comprendre que ce qui leur ait demandé n'est pas une punition, a-t-il déclaré lors d'une interview accordé à TV5 Monde. C'est une pilule très amère et nous en sommes tous conscients."

Pierre Lellouche a par ailleurs à nouveau insisté sur la nécessité de mettre en place une gouvernance économique européenne. "Ce qu'Angela Merkel appelle le renforcement du pacte de stabilité, ce que le président de la République, appelle le gouvernement économique: c'est la même chose. Nous travaillons avec eux [les Allemands] tous les jours à la préparation d'initiatives dans ce domaine", a-t-il ajouté.

Reste que les Allemands sont favorables à l'ajout de règles encore plus contraignantes au pacte de stabilité, et les Français à une coordination, au-delà des règles, dont Berlin ne veut pas entendre parler.

En dépit des démentis officiels, de nombreux économistes pensent que la Grèce sera obligée de restructurer sa dette.

POSITIONS:

Le directeur général du FMI Dominique Strauss-Kahn a reconnu qu'il pouvait exister un risque de contagion à d'autres pays européens, mais il a estimé que la France et l'Allemagne n'étaient pas menacées.

"On a cité le Portugal mais il est déjà en train de prendre des mesures et les autres pays sont dans une situation beaucoup plus solide", a-t-il déclaré dans un entretien au Parisien avant de préciser qu'il fallait cependant que chacun reste "extrêmement vigilant".

Le patron du FMI estime par ailleurs que les Européens auraient pu prêter de l'argent à un taux plus intéressant pour la Grèce, par exemple égal à celui du FMI, plus faible d'un demi point.

Réagissant dans un communiqué de presse mercredi à la mort de trois personnes intervenue au cours des manifestations en Grèce, le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, a tenté de temporiser la situation sur les marchés et les risques de contagion. Rappelant que "toutes les pensées" des Européens allaient "aux victimes humaines à Athènes", il a condamné les mouvements spéculatifs des marchés, qu'il qualifie de "totalement irrationnels". Herman Van Rompuy a, par ailleurs, insisté sur le fait que la situation de l'Espagne et du Portugal n'avait "objectivement rien à voir avec celle de la Grèce", qui est unique du fait de la combinaison de trois facteurs que l'on ne retrouve nulle part ailleurs, à savoir une insuffisante crédibilité des statistiques, un problème sérieux de compétitivité et un niveau très haut de la dette publique."
"Ceci ne veut pas dire qu'il ne faut pas que nous tirions les leçons de la crise de la zone euro", a-t-il conclu en évoquant les "réformes profondes" que la zone avait à faire.

"La Commission fera tout ce qui sera nécessaire pour s'assurer que les marchés financiers ne sont pas un terrain de jeu pour la spéculation", a pour sa part déclaré le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, lors d'une intervention devant le Parlement européen. "Nous agirons rapidement si une régulation supplémentaire est nécessaire", a-t-il ajouté, tout en indiquant que les règles budgétaires de l'UE devaient être durcies.

Pour tenter de calmer les marchés, le commissaire européen aux Affaires économiques et monétaires Olli Rehn a réaffirmé que l'Espagne n'avait pas besoin d'une aide financière de l'UE.

Il a cependant jugé préoccupant le niveau des déficits publics européens. "Afin de protéger la reprise économique, il est absolument essentiel de contenir le feu de brousse en Grèce afin qu'il ne devienne pas un feu de forêt et une menace pour la stabilité financière de l'Union européenne et de son économie dans son ensemble", a-t-il expliqué.

Face au risque de contagion de la crise grecque à d'autres pays de la zone euro, les eurodéputés socialistes et démocrates exhortent les chefs d'Etat et de gouvernements de l'UE à mettre en place rapidement un mécanisme de stabilité financière. "Nous devons mettre fin à l'attitude agressive de quelques spéculateurs tout en reconnaissant que nous avons dessiné une union monétaire qui est insuffisante en temps de crise. Il est grand temps que le Conseil européen approuve un mécanisme de stabilité financière, comme l'ont proposé en mars les dirigeants et les chefs de parti socialistes", a déclaré Maria Badia, vice-présidente du groupe S&D, lors d'un débat sur la Grèce au Parlement européen à Bruxelles.

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