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Silence, on ferme !

L’année dernière, les lycéens en colère, avec la complicité idéologique et active de certains enseignants du secondaire, ont cessé les cours pour faire retirer la loi du CPE. Bizarrement, la même année, le taux de réussite au baccalauréat a atteint des records. Aujourd’hui, les mêmes lycéens, devenus étudiants, ont déjà compromis le premier semestre (qui dure en fait un trimestre). Autrement dit, il y a bien longtemps qu’ils n’ont pas pris sérieusement le temps de se consacrer à leurs manuels pour étudier dans la sérénité de la solitude et de la concentration, préférant les démonstrations de force collective les conduisant à hurler des slogans ineptes [1]. Dans les faits, ces mouvements semblent leur donner tous les droits. Ils ont bien compris la logique de notre système en revendiquant le statut d’étudiants : en France, conquérir un statut vous permet d’éviter d’assumer la fonction.

A l’époque du CPE, Nicolas Sarkozy, ministre de l’intérieur, a considéré qu’il était de son intérêt que le premier ministre Dominique de Villepin ait quelques soucis avec la rue. Sans doute, la chute du second a permis l’ascension du premier. Mais il y a toujours un effet boomerang car aujourd’hui, c’est son gouvernement qui se trouve prisonnier d’un bras de fer avec la rue somme toute inévitable, et que même l’ouverture à gauche n’aura pu empêcher. On prend toujours un risque mortel à serrer la main de ses ennemis et à fragiliser ses propres amis. Voyez comment l’UNEF, qui fut associée avant l’été à la négociation, se permet aujourd’hui de donner des leçons à la ministre de l’enseignement
supérieur.

Cependant, la gauche serait mal inspirée d’entretenir un troisième tour social, en croyant prendre sa revanche sur la démocratie représentative qui lui a donné franchement tort dans les urnes. Car se venger de la démocratie, c’est mettre en danger la démocratie ; et les français, qui ont clairement voté pour les réformes, ne remettront pas de sitôt au pouvoir ceux qui l’auront précisément contrarié.

Le spectacle auquel nous assistons est tout de même affligeant. Je me sens personnellement humilié et bafoué quand mon ministre se fait donner la leçon par des étudiants dont le niveau réel de connaissances académiques et de culture générale est bien fragile à défaut d’avoir été sérieusement évalué. A aucun moment, alors que les AG (véritables Assemblées de Godillots) proclament l’occupation des facultés dans un simulacre de démocratie, on ne consulte l’administration ou les enseignants. Ces derniers n’ont désormais plus leur mot à dire : ils doivent obéir aux étudiants.

On voudrait programmer le suicide de nos universités que l’on ne s’y prendrait pas autrement.

Jean-Louis Caccomo

Perpignan le 19 novembre 2007

http://caccomo. blogspot. com/


[1] C’est à croire que les étudiants n’ont pas compris que, dans certaines filières exigeantes, chaque semaine d’étude manquée est difficilement rattrapable. D’autant que la seule participation en cours n’est pas suffisante étant entendu que, pour mettre toutes les chances de réussite de son côté, l’étudiant doit fournir un travail personnel intense et assidu. Ou alors l’université deviendra une imprimerie à diplôme, la planche à billet d’une monnaie qui aura perdu toute sa valeur (car le diplôme est un titre à l'instar d'une monnaie).

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