Ouvertes le 3 octobre 2005, les négociations d'adhésion entre l'Union européenne et la Turquie patinent depuis quelques années, en arrivant même à un point critique depuis la publication mardi 9 novembre du rapport de la Commission sur les progrès de la Turquie pour son entrée dans l'UE. Très encourageantes au tout début, les négociations marquent rapidement le pas en décembre 2006 puisque huit chapitres sont "gelés" du fait du refus de la Turquie d'appliquer le protocole d'Ankara au sujet de Chypre.
A l'occasion de la présentation de son rapport, la Commission a déclaré qu'il était "urgent que la Turquie remplisse ses obligations" et qu'elle "normalise ses relations avec Chypre, sans quoi le processus d'adhésion relancé il y a cinq ans mène tout droit à l'impasse" [Le Figaro]. A cinq semaines d'un Conseil européen crucial pour les relations UE-Turquie, Štefan Füle le commissaire à l'élargissement a même rajouté hier que "personne ne peut se satisfaire du rythme actuel de la négociation" [Le Figaro].
Les réactions turques ne se sont pas faites attendre. Accordant une interview à Euronews, le négociateur en chef de la Turquie de l'Union européenne, Egemen Bağış a estimé que "les raisons du blocage sont politiques", ajoutant sèchement que "la Turquie n'est pas un écolier qui attend son bulletin". A propos du problème chypriote qui "plombe le dossier" [Le Figaro], le négociateur parle non pas d'un pas vers Chypre mais de "mille pas au-delà" [Euronews]. Faisant référence au rejet du plan de Kofi Annan par les Chypriotes grecs le 24 avril 2004, le chef des négociations turc rappelle que "les Chypriotes-grecs doivent prouver qu’ils veulent réellement la paix et le compromis" [Euronews].
Dès lors, la Turquie montre son impatience. Pour le Premier ministre Reccep Tayyip Erdoğan, la Turquie se trouve "dans un processus de négociation, mais malheureusement il a été négligé. Il y a eu de nombreuses indélicatesses. La Turquie paie si cher que le gouvernement et l’opinion publique s’impatientent et se sentent offensés par cette situation" [Euronews].
En titrant "La Turquie est-elle devenue eurosceptique ?", Euronews s'interroge sur les répercussions du rapport de la Commission et rappelle que les Turcs ne sont plus que "38% à vouloir encore une entrée de leur pays dans l’Union" alors qu' "à la fin des années 90, les Turcs étaient près de 90% à y être favorables. L’hostilité de certains pays comme la France et l’Allemagne et le blocage chypriote ont eu raison de leur enthousiasme". Quoiqu'il en soit, une certaine émulation négative règne entre l'UE et la Turquie, qui fait craindre un virage de la diplomatie turque vers le Moyen Orient. Dans un article paru le 2 septembre 2009 dans Le Monde, Nathalie Nougayrède, pressentant le tour qu'ont pris les évènements, avait titré "Sommes-nous en train de perdre la Turquie ?".
Source : http://www.touteleurope.eu/